Visite d'Hu Jintao aux Etats-Unis : le yin et le yuan

Visite d'Hu Jintao aux Etats-Unis : le yin et le yuan


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echos du monde depuis 4 heures
L’utilisation du vocable de la guerre froide par les commentateurs, les allusions historiques des journalistes et la tribune « Eviter une guerre froide entre les Etats-Unis et la Chine » signée Kissinger démontrent, s’il en était besoin, les relations complexes qu’entretiennent la superpuissance américaine et le géant émergent chinois. Si Hillary Clinton refuse toute politique semblable à la doctrine du « containment » de Truman, Pékin appelle à l’abandon de « la mentalité des relations « à somme nulle », caractéristique de la guerre froide ». C’est pourquoi, la visite officielle de quatre jours effectuée la semaine dernière par le Président chinois aux Etats-Unis marque la volonté d’un rapprochement entre les deux pays, sur fond, cependant, de tensions politiques et économiques.

Pourtant, les Etats-Unis et la Chine possèdent des diplomaties qui présentent des axiomes communs. Concernant le réchauffement climatique, Pékin et Washington sont la cible de toutes les attentes et de toutes les critiques, alors même qu’ils possèdent la technologie pour progresser en ce domaine. Mais là aussi, la fracture est flagrante : Pékin pointe du doigt les pays développés, expliquant la nécessité qui est la leur de prendre leurs responsabilités, tandis que pour Washington, le véritable enjeu est celui de la transition écologique des économies à l’industrialisation effrénée et peu réglementée des pays émergents, en particulier ceux du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine). La question de Taïwan et de ses liens avec Washington, en particulier dans le domaine militaire et la vente d’arme représentait un point de divergence, alors que la question de la péninsule coréenne et de sa dénucléarisation et celle du repositionnement stratégique et diplomatique nippon trouvèrent rapidement un consensus.

Mais la question principale concerne le domaine économique et commercial, avec la revendication américaine sur la politique monétaire de la Chine. Selon Washington, la sous-évaluation de la devise chinoise alourdit le déficit commercial américain à l’égard de Pékin (270 milliards de dollars). Il y a deux semaines, Timothy Geithner, le Secrétaire au Trésor américain, a rappelé son souhait de voir le yuan s’apprécier davantage. En ce sens, la Chambre des représentants a voté, en septembre dernier, un projet de loi hostile à la sous-dévaluation du yuan, preuve ouverte d’une guerre commerciale entre Pékin et Washington. La « Currency Reform for Fair Trade Act » (« Loi de réforme monétaire pour un commerce équitable ») cible, sans les nommer, les Etats qui influent leur marché des changes, et dont la monnaie est « fondamentalement sous-évaluée ».

Françoise Lemoine, économiste senior au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), expliquait dans une interview à la chaîne France 24 que les Etats-Unis et la Chine « entretiennent une telle interdépendance économique, commerciale et financière qu’il est normal de voir leurs relations se tendre selon les intérêts de chacun ». Mais un compromis économique est tout à fait possible, tant les entreprises et investisseurs américains, et donc le gouvernement, ont tout à gagner de l’ouverture du marché chinois, le plus dynamique au monde.

Si les ajustements de la diplomatie américaine par rapport à l’évolution de la puissance s’annoncent d’emblée difficile, avant tout parce que Washington craint la perte de son leadership, les deux pays ont tout à perdre d’une quelconque confrontation, du fait de leur interdépendance économique. A titre d’exemple, la Chine est le premier investisseur aux Etats-Unis. Mais, de toutes évidences, la Chine cherche à polir son image sur la scène internationale : bien que demeurant indépendante, et parfois provocante, comme ce fut le cas avec l’évocation du Prix Nobel de la Paix, ses concessions ou ses prises de positions aux côtés des Etats-Unis sont de plus en plus nombreuses. Sur nombre de sujets, notamment géopolitiques, le consensus avec la puissance chinoise se trouve facilement.