Jean-Noël Guérini, sénateur et président socialiste du conseil général des Bouches-du Rhône, a été mis en examen jeudi dans une affaire de marchés publics présumés frauduleux. Il a aussitôt annoncé qu'il se mettait en congé du PS pour ne pas gêner ses camarades lors de la primaire en vue de la présidentielle.
Vous venez d’être mis en examen pour, «association de malfaiteurs, prise illégale d’intérêt et trafic d’influence», dans quel état d’esprit êtes vous aujourd’hui?
JEAN-NOEL GUERINI. «Je suis combatif. Ce qui m’arrive est totalement injuste. Je suis innocent et lucide. Le tribunal médiatique n’a que faire de la présomption d’innocence. Je me tais depuis un peu plus de deux ans. Depuis que l’enquête est ouverte, on m’écoute, on m’épie, on m’espionne. Des cabinets noirs agissent à Marseille et à Paris. Renaud Muselier (Ndlr: député UMP des Bouches-du-Rhône) est à la manœuvre : il attaque, salit, blesse. Je regrette qu’un petit nombre de socialistes soit devenus ses complices. Les intriguants et ambitieux de tous poils répandent leur fiel pour entacher ma réputation. C’est insupportable et je les préviens : malgré cette mise en scène, je suis un homme libre et je vais me battre. Sans peur.
Si vous n’avez rien à vous reprocher, pourquoi demander que la procédure judiciaire quitte Marseille?
La justice marseillaise n’est pas du tout sereine. Je conteste avec fermeté tous les motifs de ma mise en examen qui relève d’une décision politique. Le scénario était écrit à l’avance. J’en ai eu la preuve en rentrant dans le bureau du juge : quatre questions pas plus m’ont été posées.. Mes avocats vont déposer lundi ou mardi des requêtes en nullité. Je ne demande pas à échapper à la justice. Mais je veux simplement que mes droits soient respectés.
Dans des écoutes, on vous entend dire à votre frêre Alexandre Guérini de «débarrasser son bureau»...
J’ai une reçu une lettre anonyme m’avertissant qu’une enquête allait être diligentée contre mon frère. Qu’est ce que je fais? J’ai agi comme un frère. Je lui ai conseillé de nettoyer un peu son bureau, ses dossiers. Sans plus.
Et cet «ami», présent dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, qui vous aurait prévenu de l’ouverture d’une enquête, qui est-ce?
J’ai des dizaines d’amis. De part mes fonctions, j’ai des contacts avec la police, la gendarmerie, des représentants de la justice. Que l’on soit clair : monsieur Bernard Squarcini (Ndlr : patron de la direction centrale du renseignement intérieur) ne m’a jamais informé de quoi que ce soit. Voilà. Monsieur Squarcini a été un grand préfet de police à Marseille.
Ca reste un ami?
C’est une relation professionnelle.
Et ces disques durs d’ordinateurs détruits juste avant une perquisition?
Vous plaisantez! Je n’ai rien ordonné. Rien. C’est mon directeur de cabinet qui a changé trois ordinateurs qui buggaient. Il n’y avait aucun secret à l’intérieur. Le jour de la perquisition, dont personne n’avait été averti, j’étais en Pologne. J’accompagnais des élèves de 3ème à Auschwitz pour un travail de mémoire. Tout ça, ce sont des montages politiques.
Avez vous revu votre frère depuis sa sortie de prison?
Non. C’est un problème personnel... (un long moment) Je le repète : lui c’est lui et moi c’est moi. Mais je n’ai peut-être pas suffisamment porté attention au fait que, pour certains, à travers lui en fait c’est moi que l’on visait.
Allez vous démissionner de votre fonction de président du conseil général?
Non, je ne démissionnerai pas. Je viens de signer un arrêté transmettant mes pouvoirs à mon premier vice-président. Je me mets en retrait à partir de ce soir pour assurer ma défense. A partir de lundi, je ne viendrai plus au conseil général. Mais il n’est pas question pour moi de démissionner. Ma gestion n’est en rien mise en cause. J’ai été réélu en mars dernier avec une très large majorité. J’ai la confiance de mes conseillers généraux. Qui peut me faire démissionner aujourd’hui? Personne.
Harlem Désir, vous appelle à quitter le PS et pas simplement à vous mettre «en congé»...
Ca me fait sourire. Ce garçon est décidement un tout petit personnage. Je me mets en congé du parti car je ne veux pas être la balle de ping-pong que l’on se renvoie pendant les primaires. Et voilà qu’un premier secrétaire intérimaire qui retournera au néant après le 16 octobre me pousse à la démission. Je n’ai pas de leçon à recevoir : selon le site Wikipédia, Désir a été condamné à 18 mois de prison avec sursis en 1998. Voilà que ce monsieur me donne des lecons de politique alors que lui même n’a jamais été élu au suffrage universel direct sur son propre nom. Son acharnement est inversement proportionnel à ce qu’il représente.
Craignez vous votre exclusion comme le réclame Arnaud Montebourg?
Non. Je suis socialiste depuis l’âge de 16 ans et je le resterai. N’en déplaise à Montebourg qui n’est pas un grand homme politique comme le souligne cruellement les sondages. Il prend les caméras pour des miroirs et s’écoute parler dans le vide. Le député Arnaud et le procureur Montebourg confondent la scène politique avec les prétoires. J’appelle à la retenue les responsables socialistes qui par effet de mode tiendraient des propos déplacés. A chaque fois que je serai attaqué, je répondrai. Je ne me laisserai pas traîner dans la boue et massacrer. Ni par des élus de droite ni par des élus de gauche.
Les autres candidats aux primaires ont aussi pris leur distance...
Je n’ai pas entendu Ségolène Royal s’acharner. François Hollande a simplement demandé mon retrait, pas ma démission. Je prends acte de leur retenue. Quant à Monsieur Valls qui me critique aujourd’hui, il a eu besoin de moi. Nous avons fait un bout de chemin ensemble au dernier congrès du PS (Ndlr : 1998). Ainsi va la vie...
Avez vous eu Martine Aubry au téléphone?
Non. Mon rôle est d’être au dessus de la mêlée. Je n’ai pas apporté mon soutien à Martine Aubry. Je ne suis pas fou. Je ne rendrai pas public mon vote même si le travail de Martine Aubry a été formidable en trois ans.
Le Parisien
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